Les outils du gemmologue expliqués simplement
Nathalie DEVOSQuand on observe une belle pierre brillante, une question revient souvent : est-elle naturelle, synthétique ou traitée ? Et quelle est sa véritable identité ?
À l’œil nu, il est souvent difficile de distinguer un Rubis d’un Spinelle, ou une Améthyste naturelle d’une imitation en verre coloré.
C’est pourquoi les gemmologues utilisent plusieurs outils spécifiques pour analyser les propriétés optiques et réactions lumineuses des pierres.
Dans cet article, découvrons six outils essentiels de la gemmologie qui permettent d’identifier avec précision les pierres fines et précieuses, sans jargon compliqué !
Le réfractomètre : mesurer l’indice de réfraction

À quoi sert-il ?
Le réfractomètre est l’un des outils les plus importants en gemmologie. Il permet de mesurer l’indice de réfraction (IR) d’une pierre, c’est-à-dire la manière dont la lumière se déplace à l’intérieur.
Chaque minéral possède une plage d’indices spécifiques. Par exemple :
- Quartz : environ 1,54
- Grenat : 1,73
- Diamant : 2,42
Comment ça fonctionne ?
On place une goutte de liquide spécial sur une petite plaque de verre, puis la pierre polie (face plane) est posée dessus. En regardant à travers l’appareil, on lit une ou deux valeurs qui aident à identifier la pierre ou à éliminer certains candidats.
Le polariscope : savoir si la pierre est anisotrope ou isotrope

À quoi sert-il ?
Le polariscope sert à savoir comment la lumière est polarisée dans une pierre. Cela permet de distinguer :
- Les pierres anisotropes (qui dédoublent la lumière) : comme le Saphir ou l’Améthyste.
- Les pierres isotropes (pas de dédoublement) : comme le Spinelle ou le Grenat.
Comment ça marche ?
On place la pierre entre deux filtres polarisants et on observe les changements de lumière en la tournant. Cela révèle si la pierre a un comportement optique simple ou complexe, ce qui donne des indices sur son identité.
Le conoscope : révéler le système cristallin
À quoi sert-il ?
Le conoscope est un petit cylindre en verre ou en plastique utilisé avec le polariscope. Il permet de visualiser les figures d’interférence dans une pierre anisotrope, ce qui révèle son système cristallin (uniaxe ou biaxe).

Par exemple :
- Uniaxe : Quartz, Corindon (Rubis, Saphir)
- Biaxe : Tourmaline, Péridot
Pourquoi c’est utile ?
Savoir si une pierre est uniaxe ou biaxe réduit les possibilités d’identification et permet parfois de détecter des imitations (les synthétiques ont souvent des comportements optiques différents).
La balance et la densitométrie : mesurer le poids et la densité d’une pierre

À quoi ça sert ?
La balance de précision est un outil indispensable en gemmologie. Elle permet de mesurer le poids exact d’une pierre, souvent au centième de carat près. En ajoutant un test de densitométrie (mesure de la densité relative), on obtient une donnée clé pour identifier une gemme.
Exemples :
- Le Grenat a une densité d’environ 3,5 à 4,3
- Le Quartz est plus léger, autour de 2,65
- La Topaze atteint environ 3,55
Comment fait-on ?
La méthode la plus courante est celle de la balance hydrostatique. On pèse d’abord la pierre dans l’air, puis une deuxième fois plongée dans l’eau (suspendue par un fin fil). Grâce à la différence de poids, on peut calculer sa densité avec une simple formule :
Pourquoi c’est utile ?
La densité est une propriété caractéristique de chaque minéral. Elle permet de différencier deux pierres visuellement proches (par exemple Quartz et Topaze), mais aussi de repérer certaines imitations en verre, souvent moins denses. C’est une technique simple, fiable et accessible, qui complète parfaitement les autres outils d’analyse.
Le filtre Chelsea : détecter certaines couleurs cachées

À quoi sert-il ?
Ce petit filtre de couleur verte permet de voir des réactions spécifiques à certaines pierres. Il a été créé à l’origine pour distinguer les Émeraude naturelles des imitations en verre vert.
Ce qu’il révèle :
- L’Émeraude (naturelle ou synthétique au Béryllium) apparaît souvent rouge ou rose à travers le filtre.
- Le verre vert ne change pas de couleur.
- Certains Grenats, Alexandrite ou verres traités peuvent aussi réagir.
Pourquoi ce n’est pas suffisant seul ?
Le filtre Chelsea ne donne pas de certitude, mais c’est un outil pratique pour détecter des anomalies ou suspects rapidement.
Le dichroscope : observer le pléochroïsme d’une pierre

À quoi sert-il ?
Le dichroscope permet de voir si une pierre montre plusieurs couleurs selon l’angle d’observation.
C’est ce qu’on appelle le pléochroïsme. L’appareil sépare les différentes teintes visibles à l’intérieur d’une pierre, ce qui aide à identifier certaines gemmes.
Exemples :
- La Tanzanite peut montrer du bleu, du violet et du rouge
- L’Iolite présente un bleu-violet et un gris jaunâtre
- Le Rubis peut révéler du rouge et du orangé
Pourquoi c’est utile ?
Le pléochroïsme est une propriété optique typique de certaines pierres, et son observation aide à les différencier.
Le dichroscope permet aussi de faire la différence entre des gemmes naturelles, synthétiques ou imitées, surtout quand les couleurs observées ne correspondent pas à ce qu'on attend.
Le spectroscope : analyser la lumière absorbée par la pierre

À quoi sert-il ?
Le spectroscope décompose la lumière qui traverse une pierre en spectre de couleurs, un peu comme un arc-en-ciel. Certaines pierres absorbent des bandes spécifiques, ce qui crée des lignes sombres visibles dans le spectre.
Exemples :
- Le Rubis montre une bande forte dans le rouge (chrome)
- Le Péridot présente trois bandes nettes
- L’Améthyste peut présenter des bandes violacées floues
Pourquoi c’est utile ?
Le spectre est souvent caractéristique d’un élément chimique (chrome, fer, cobalt…), donc il aide à confirmer une identification. Il est aussi utile pour détecter certaines imitations ou traitements.
La lampe UV : observer la fluorescence

À quoi sert-elle ?
Certains minéraux réagissent aux lumières ultraviolettes (UV), courtes ou longues. Ils émettent alors une lumière visible : c’est la fluorescence.
Ce qu’elle permet :
- Détecter certaines pierres (ex. : la Fluorite ou le Diamant bleu peuvent briller en bleu)
- Repérer certains traitements ou résines utilisées sur les pierres
- Distinguer un Rubis naturel d’un Rubis traité
Attention :
Toutes les pierres ne réagissent pas, et la réaction peut varier selon la provenance, donc ce n’est pas un test définitif. Mais cela reste un bon complément d’analyse.
Conclusion
L’identification des pierres fines et précieuses ne repose jamais sur un seul outil.
Un.e gemmologue croise toujours plusieurs observations pour arriver à une conclusion fiable.
En résumé :
| Outil | Utilité principale |
|---|---|
| Réfractomètre | Mesure l’indice de réfraction |
| Polariscope | Détermine le comportement optique |
| Conoscope |
Révèle le système cristallin (uniaxe/biaxe) |
| Balance hydrostatique |
Permet de déterminer la densité d'un objet |
| Filtre Chelsea | Détection rapide de certaines couleurs |
| Spectroscope | Analyse les bandes d’absorption lumineuse |
| Lampe UV | Observation de la fluorescence |
Ces outils, combinés à l’expérience et à l’observation minutieuse, permettent d’identifier avec précision une pierre naturelle, synthétique ou traitée.
Ils sont indispensables pour éviter les confusions, surtout entre pierres précieuses et imitations bien faites.
Nathalie - ENAE Minéraux 💜

